Une Boussole pour fixer le cap vers la compétitivité
Le document publié le 29 janvier vise à traduire en actes concrets la première des priorités que la Commission s’est fixée pour le mandat 2024-2029: la compétitivité.
En juillet dernier, Ursula von der Leyen avait présenté ses orientations politiques devant le Parlement européen. Même si ces dernières étaient inspirées des priorités fixées par les chefs d’Etat et de Gouvernement quelque temps auparavant, il s’agissait d’un exercice initialement porté par la seule Présidente de la Commission. Depuis, le nouveau Collège est entré en fonction le 1er décembre 2024 (voir article Le renouvellement des institutions de l’UE se poursuit | Europe (europe-en-nouvelle-aquitaine.eu)), et chaque commissaire a reçu une lettre de mission pour le portefeuille dont il ou elle aura la charge.
L’exercice de "boussole pour la compétitivité", rendu public le 30 janvier 2025, représente le premier grand exercice collectif de ce nouveau mandat. Les pistes de travail, qui avaient été esquissées depuis la reconduction d’Ursula von der Leyen à la tête de la Commission, sont précisées, détaillées, mises en perspective et surtout inscrites dans un calendrier de travail qui couvrira les deux premières années du mandat: 2025 et 2026.
Sur le même modèle que la Boussole du numérique (voir article La Commission se lance dans une décennie numérique | Europe (europe-en-nouvelle-aquitaine.eu)), la Boussole pour la compétitivité est présentée comme un "cadre stratégique et clair pour orienter les travaux" à venir. Mme Von der Leyen l’a même qualifiée d’"étoile polaire qui guidera cette nouvelle Commission".
Le document vise également à traduire, dans le programme de travail des différentes directions générales (DG) de la Commission, les recommandations des rapports Draghi et Letta pour renforcer la compétitivité de l’Union européenne.
Construite autour de trois grands axes (innovation, décarbonation et sécurité) et de cinq "catalyseurs d’innovation", la Boussole pour la compétitivité liste une cinquantaine de mesures, parmi lesquelles:
- Le Pacte pour une industrie propre, attendu pour le 26 février 2025, en même temps qu’un Plan d’action pour une énergie abordable, un Règlement dit "Omnibus" pour simplifier les exigences imposées aux entreprises par certaines directives (notamment CSRD et CS3D), et une définition des petites Entreprises de Taille Intermédiaire (ETI);
- Une stratégie pour les start-ups et les entreprises en expansion [attendue pour le printemps 2025];
- Un cadre règlementaire visant à rationaliser le cadre règlementaire existant et à créer des conditions-cadres pour soutenir le développement, notamment en ce qui concerne l’accès au capital-risque et le test de nouvelles technologies dans les conditions du marché [fin 2025 – début 2026];
- Une stratégie [printemps 2025] et une règlementation [automne 2025] sur le quantique pour créer un alignement des programmes européens et nationaux et soutenir l'investissement dans l'infrastructure paneuropéenne de calcul, de communication et de détection quantiques;
- Un cadre stratégique et règlementaire pour développer le potentiel des biotechnologies, la bioéconomie et l’économie circulaire [2025-2026];
- Une règlementation pour répondre à la demande en hausse exponentielle de matériaux avancés innovants [2026];
- En matière de transport, un plan d’investissement pour les transports durables (sur la production et la distribution de carburants renouvelables et bas carbone, et les infrastructures de recharge), un plan pour déployer un réseau européen ferroviaire à grande vitesse, et une stratégie portuaire sont tous trois annoncés en 2025;
- Un Pacte pour les Océans [printemps 2025] pour booster l’innovation autour des technologies maritimes, de la production d’énergies propres et de la sécurité alimentaire;
- Une révision du cadre des aides d’Etat [printemps 2025] et des directives marchés publics qui pourraient voir apparaitre des clauses de préférence européenne pour les technologies et secteurs stratégiques [2026].
De façon plus transversale, plusieurs mesures sont aussi planifiées autour du développement des compétences, de l’attractivité des métiers, et des normes. Du côté des financements, l’aboutissement d’une Union de l’épargne et des capitaux est présenté comme une étape importante pour soutenir la compétitivité européenne. Dans le cadre des réflexions sur le budget post-2027, la Commission annonce également la mise en place d’un Fonds pour la compétitivité qui "remplacera plusieurs instruments financiers existants". De même, l’adoption d’un outil de coordination de la compétitivité visant "à aligner les politiques et les investissements en matière d'industrie et de recherche au niveau de l'UE et au niveau national" est attendue pour mi-2025. Ces deux dernières initiatives suscitent l’inquiétude d’une grande partie de l’écosystème bruxellois, car elles risquent de chambouler le paysage des programmes existants (Horizon Europe, IPCEI, Plans de relance, etc.) dans un contexte de préparation budgétaire post-2027 assez tendu.