Accord au Conseil européen sur le budget 2021-2027
Dans la nuit du 21 juillet, après cinq jours de négociations, les 27 chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE ont trouvé un accord, sur la base de la proposition faite en mai 2020 par la Commission européenne (CE), pour le futur Cadre financier Pluriannuel (CFP) 2021-27 assorti d’un plan de relance "Next generation EU" (NGEU) de 750 Milliards€ (voir notre article). La prochaine étape est la négociation pour approbation du Parlement européen.
L’accord fixe l’objectif de 30% de l’ensemble des dépenses du CFP et du plan de relance consacrés à la lutte contre le changement climatique, soit au-delà des 25% prévus. L’objectif de 40% pour le climat pour la PAC et de 30% pour la politique de cohésion sont maintenus.
Le Conseil a fixé le montant du CFP à 1.074,3 milliards€, contre 1.100 dans la dernière proposition de la CE. Un montant proche du budget actuel de 1,082 milliards sans les Britanniques.
"Next generation EU" est maintenu à 750 milliards€. Cependant, après d’âpres négociations, le rapport deux tiers de subventions et un tiers de prêts est modifié pour un rapport de 52%/48%. Ainsi, 390 milliards€ seront alloués sous forme de subventions et 360 milliards€ pourront être utilisés pour des prêts. La France devrait se voir octroyer 40 milliards€ en subventions.
La "Facilité pour la reprise et la résilience" (FRR) devient l’instrument privilégié du plan de relance, totalisant 672,5 milliards€ sur les 750 (312,5 milliards en subventions et 360 milliards en prêts). La Facilité est ainsi abondée de 112,5 milliards€, que la CE avait initialement fléchés vers les programmes du CFP.
Invest EU et Horizon Europe subissent une forte baisse, même si leurs enveloppes sont largement augmentées par rapport aux moyens actuels. Invest EU passe de 1,3 milliard sur le CFP et 30,3 milliards du NGEU dans la proposition de la CE de 2020 à 2,8 milliards, complétés par 5,6 milliards du NGEU pour un total de 8,4 milliards. Le programme Horizon Europe voit son aide de 13,5 milliards supplémentaires de NGEU tomber à 5 milliards. Son enveloppe passe ainsi d’un potentiel de 94,4 milliards à 80,9 milliards, ce qui reste une augmentation de 25% par rapport à sa dotation actuelle. La transition numérique sera soutenue par le nouveau programme "Europe numérique" (Digital Europe) avec 6,8 milliards€.
Disparaissent du plan de relance, l’instrument d’ "Aide à la solvabilité des entreprises", le coup de pouce de 7,7 milliards au programme EU4health (santé) qui n’est plus doté que de 1,67 milliard€ sur le CFP, ainsi que celui à la politique extérieure.
L’aide de 15 milliards au Fonds européen agricole de développement rural (FEADER) est divisée par deux, et l’initiative ReactEU (abondement de la politique de cohésion) perd les 5 milliards qui auraient dû être disponibles dès 2020 et 2,5 milliards du plan de relance pour s’établir au final à 47,5 milliards. Des actions démarrées à partir du 1er février 2020 pourraient toutefois être éligibles à un financement au titre de ReactEU. Avec 87,995 milliards€, l’enveloppe FSE+ 2021-2027 est en baisse de 9% par rapport au budget actuel.
Le Fonds de Transition Juste qui devait obtenir 30 milliards€ du NGUE n’en obtient plus que 10, auxquels s’ajoutent les 7,5 milliards du CFP.
La politique de cohésion et la PAC sont épargnées par la coupe de près de 25 milliards effectuée sur le CFP.
Le premier pilier de la PAC est en baisse de 10% par rapport au budget actuel passant à 258,6 milliards.
Avec 77,850 milliards sur le CFP, le FEADER est augmenté par rapport à la proposition 2018 de la CE, mais reste en baisse de 13 milliards en comparaison au budget actuel. Néanmoins, il est renforcé de 7,5 milliards du plan de relance. Un coup de pouce qui lui permet d’atteindre une enveloppe de 85,35 milliards, plus proche des 96,7 milliards actuels. Des dotations supplémentaires sont octroyées à 15 Etats membres pour un montant de 5,350 milliards. La France obtient le montant le plus élevé avec 1,6 milliard€.
Le Conseil n’a pas encore avancé de chiffres à ce stade pour le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP) et pour le programme LIFE.
L’enveloppe du nouveau programme de Fonds européen de défense que la CE souhaitait créer avec 11,5 milliards€, n’a pas changé depuis février 2020 avec un montant de 7,014 milliards.
Le budget Erasmus+ est augmenté de 55% par rapport au budget actuel avec 21,2 milliards. En revanche, Europe Créative, que la CE avait revu à la baisse en 2020, est maintenu à 1,642 milliard€, soit une augmentation de 15% vis-à-vis du budget actuel. Le programme Justice, Droits et Valeurs (incluant "l’Europe pour les citoyens") est légèrement réduit de 8%.
Sur les rabais, les pays dits "frugaux" et l’Allemagne obtiennent 53 milliards€ de rabais sur leur contribution au budget européen, contre les 46 de la période actuelle.
De nouvelles ressources propres sont proposées mais pas encore adoptées, elles seront utilisées pour rembourser l’emprunt de NGEU: une taxe sur le plastique non-recyclé (0,80€ par kilo) dès 2021, un ajustement de la taxe carbone aux frontières et une redevance numérique qui pourraient être mise en œuvre avant 2023 sur la base d’une proposition de la CE attendue au premier semestre 2021. Il est prévu d’étendre les revenus du marché d’émission carbone (ETS) au secteur maritime et à celui de l’aviation, ainsi qu’une taxe sur les transactions financières pour discussions futures.
Le Parlement européen a adopté le 23 juillet à une large majorité (465 pour, 150 contre, 67 abstentions) une résolution pour réclamer l'ouverture de négociations afin d'amender le cadre financier adopté par les chefs d'Etats et de gouvernement. Les eurodéputés rappellent qu'il leur est possible d'approuver le volet lié au plan de relance (ainsi que les nouveaux programmes, comme la PAC ou la politique régionale), sans pour autant donner leur approbation au nouveau budget 2021-2027. Selon eux, l'Union européenne pourrait fonctionner sur la base de l'ancien cadre financier, en douzième mensuel.