Conclusions du Dialogue stratégique européen sur l’avenir de l’agriculture et de l’alimentation : les débats sur l’avenir de la PAC sont lancés

Le dialogue stratégique pour l’avenir de l’agriculture de l’UE est une initiative de la Présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Lancé début 2024 en pleine crise agricole, il a rassemblé pendant huit mois, et dans la plus grande confidentialité, les principaux acteurs européens de l’ensemble de la chaîne agroalimentaire qui avaient pour objectif de s’accorder autour d’une "vision commune de l’agriculture dans l’UE".

Ce qui semblait relever pour certains au départ d’un pari risqué aux vues des tensions et divergences de visions entre les parties prenantes du dialogue (organisations agricoles, associations environnementales et de consommateurs, distributeurs ou encore producteurs de produits phytosanitaires), a finalement abouti à un rapport final adopté par les 27 organisations membres. Ce rapport a été rendu public le 4 septembre dernier. Il contient des recommandations qui devraient, comme l’a annoncé Ursula von der Leyen, "guider" la Commission pour la rédaction d’une "vision pour l'agriculture et l'alimentation", papier attendu début 2025. Par ailleurs, le 17 septembre, la Présidente de la Commission a proposé le Luxembourgeois Christophe Hansen au poste de Commissaire à l’agriculture et l’alimentation, en charge "de donner vie au rapport et aux recommandations du dialogue stratégique." Elle demande également plus largement à tous les Commissaires, dans leurs lettres de missions, de tenir compte du dialogue stratégique, au même titre que les rapports Draghi ou Letta.

La publication de ce rapport a été largement saluée, tant la méthode est inédite et portée au plus haut niveau. Les recommandations sont néanmoins posées de façon assez prudente pour que chacun y trouve son compte. Pas de révolution donc, mais des évolutions en profondeur tout de même, qui lancent le débat en particulier sur la future PAC, dont la proposition législative est annoncée pour la fin de l’été 2025, dans un contexte budgétaire exceptionnellement tendu. 

Le rapport remet en effet en question l’aide au revenu telle qu’elle existe actuellement, et plaide pour un meilleur ciblage sur certains agriculteurs actifs, en s’écartant (sans l’abandonner) du système actuel des paiements à la surface et non dégressifs. L’architecture verte fait également l’objet d’une réflexion, partant du constat que la conditionnalité des aides n’est pas adaptée. Un nouveau volet environnemental pour la PAC est évoqué, qui inciterait au développement de pratiques durables, notamment via des paiements pour services environnementaux ciblés et axés sur les résultats. Les parties prenantes du dialogue précisent que le budget devra être revu en conséquence et que le soutien financier aux actions en faveur de l’environnement et du climat devra augmenter considérablement chaque année au cours des deux périodes suivantes de la PAC, à commencer par la part actuelle du budget consacrée aux écorégimes et aux instruments agroenvironnementaux et climatiques.

La création d’un autre fonds en dehors de la PAC est préconisée, pour aider à restaurer et gérer les habitats naturels: le "Fonds pour la restauration de la nature". Un Fonds agricole temporaire pour une transition juste, distinct du budget PAC, est également proposé afin notamment de venir en aide aux territoires les plus impactés "par une transition rapide du secteur vers la durabilité". 

Si la Présidente de la Commission se félicite de ces résultats, les premières réactions des colégislateurs, qui n’ont pas participé à l’exercice, sont plus mitigées. La traditionnelle question d’une révolution vs évolution de la PAC va très vite se poser. La présidence hongroise de l’UE travaille à des conclusions du Conseil sur le futur de la PAC. Elle pourrait pousser pour un projet conservateur en maintenant et simplifiant les outils tels qu’ils existent actuellement. D’autres Etats en revanche, comme l’Allemagne ou le Danemark, réfléchiraient à des alternatives aux paiements directs sous la forme de Paiements pour services environnementaux (PSE).

En tout état de cause, ce sont les enjeux liés au Cadre Financier Pluriannuel 2028-2034 (budget européen) qui ne laisseront probablement pas beaucoup de choix ! Les lettres de missions que Ursula von der Leyen a fait parvenir aux futurs Commissaires européens sont sans appel quant à la volonté d’une révision en profondeur du budget européen. Le Commissaire désigné au budget est ainsi appelé à porter une nouvelle approche du budget. Ursula von der Leyen place également le Commissaire à l’agriculture sous la direction du Vice-Président chargé de la cohésion et des réformes, ce qui pourrait laisser la porte ouverte à une nouvelle approche du budget consacré à la future PAC. 

Faciliter la mobilité foncière, introduire un objectif contraignant de zéro artificialisation nette en 2050, réviser la directive sur les marchés publics, établir un plan d’actions européen pour le renouvellement des générations et pour l’élevage, développer les biocontrôles, poursuivre la réduction des émissions de GES du secteur, réviser le paquet "bien-être animal" ou encore développer la consommation de protéines végétales… sont autant de propositions formulées dans le cadre de ce dialogue stratégique. Difficile à ce stade de savoir ce qui sera retenu ou pas par la Commission européenne.   

Le Dialogue stratégique sur l’avenir de l’agriculture de l’UE 

Principales initiatives: dialogue stratégique sur l’avenir de l’agriculture de l’UE

Les lettres de mission des Commissaires désignés