Thumbnail

Un pacte vert pour l’Europe

La volonté de réussir sa transition énergétique et les négociations internationales sur le changement climatique poussent la nouvelle Commission européenne à proposer d’accentuer l’effort européen de réduction des gaz à effet de serre de 50 à 55% en 2030 pour atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050. Cet objectif a été entériné par le Conseil européen (réunion des chefs d’Etat et de gouvernement) le 12 décembre, à l’exception de la Pologne, qui n’a pas souhaité s’engager. La Commission confirme qu’au moins 25% du budget à long terme de l’UE sera consacré à l’action pour le climat, avec l’appui de la Banque européenne d’investissement.

Visant également des objectifs de réduction de tous les types de pollution, le « Pacte vert pour l’Europe » avait été présenté la veille par la Présidente de la Commission au Parlement européen réuni en session extraordinaire. Ce Plan doit positionner les entreprises européennes au premier rang mondial des technologies propres, l’Europe se montrant comme le premier continent climatiquement neutre en 2050, tout en trouvant les moyens de rendre cette transition juste et partagée.

A charge du Vice-président de la Commission, Frans Timmermans, de présenter dans les cent jours de la nouvelle Commission, une série de textes législatifs, déclinant la feuille de route qui détaille, en annexe du Pacte, une dizaine de domaines d’action essentiels:

  • Une énergie propre

La production et la consommation d’énergie représenteraient plus de la moitié des émissions de l’UE (75% en comptant les transports). Pour décarboner ce mix, la Commission veut appliquer le "paquet énergie" portant notamment sur les normes d’efficacité énergétique, l’interconnexion des systèmes européens et le rôle donné aux consommateurs. Cette législation pourrait être réexaminée dès le mois de juin 2021, quand sera présentée une réforme de la taxation de l’énergie et, pour certains secteurs, un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières permettant de refléter le carbone dans les prix des produits importés. La Commission souhaite à la fois respecter les règles de l‘OMC et voir défendu de hauts standards environnementaux dans les échanges mondiaux.

A l’appui de ces mesures, la Commission lance un "mécanisme de transition juste" de 100 milliards € d'investissements, destiné avant tout à répondre aux pays très dépendants des énergies fossiles et qui sera dévoilé en janvier prochain.

Enfin, elle souhaite développer pleinement le potentiel de l’éolien en mer via une stratégie spécifique.

  • Dans le secteur du bâtiment et de la construction

Les bâtiments représentent 40% de la consommation énergétique. L’objectif est de réduire cette facture en doublant les taux de rénovation actuels répondant aux objectifs stricts d’efficacité énergétique, mais aussi en étant plus résilients au changement climatique.

La Commission va lancer en 2020 une plateforme ouverte réunissant des représentants des secteurs du bâtiment et de la construction pour dégager de nouveaux investissements innovants. Elle promet de veiller particulièrement à la rénovation des logements sociaux, pour aider les ménages qui ont des difficultés à payer leurs factures d’énergie.

  • Un secteur de l’industrie plus durable

Les activités d’extraction et de transformation des ressources représentent au moins 90% de la perte de biodiversité et de ressources en eau. En outre, l’industrie européenne n’utilise que 12% de matériaux recyclés.

La Commission présentera en mars 2020 une nouvelle stratégie industrielle qui soutiendra la transformation verte des industries grosses consommatrices d’énergie fossile (acier, ciment).

Elle produira aussi un nouveau Plan d’action en faveur de l’économie circulaire touchant en particulier les secteurs du textile, de la construction, les produits électroniques et les matières plastiques. Son but est d’obliger tous les emballages à être réutilisables ou recyclables d’ici 2030, et de développer de nouveaux marchés pour les produits circulaires, comme les systèmes de reprise, pour limiter les produits à usage unique.

  • La mobilité durable

Les transports représenteraient 25% des émissions de l’UE, part qui ne cesse d’augmenter (dont au moins 71% relèvent du seul secteur routier).

L’objectif est de réduire ces émissions de 90% d’ici 2050. La Commission veut pour cela agir aussi bien sur les transports publics que privés, en améliorant la digitalisation, en appliquant une tarification routière plus efficace et des normes de pollution automobile plus strictes, ainsi qu’en faisant passer plus de marchandises par le rail et les voies d’eau.

La Commission souhaite réexaminer les modes de tarification routière en Europe, proposant de retirer sa directive Eurovignette si nécessaire, et dans la mesure où des mesures de substitution aussi ambitieuses lui seraient proposées par le Parlement et le Conseil.

La Commission estime que d’ici 2025, un million de stations de recharge sera nécessaire aux véhicules électriques et que les 13 millions de véhicules propres seront atteints en Europe. Elle organisera dès 2020 un appel de fonds pour les bornes de recharge.

  • Soutenir la biodiversité

La Commission présentera une stratégie en faveur de la biodiversité d’ici mars 2020; elle y mentionnera en particulier des mesures destinées à accroître la biodiversité dans les zones urbaines et à rendre les villes européennes vertes.

Elle soutiendra également les ressources forestières à travers une nouvelle stratégie, poussant à la plantation de nouveaux arbres et la restauration des forêts endommagées, et en soutenant les importations qui n’entraînent pas de déforestation à l’étranger.

Enfin la Commission souhaite valoriser l’utilisation des ressources marines, notamment la production protéique issue d’algues, et les énergies marines renouvelables.

  • Verdir la PAC: "De la ferme à la table"

L’agriculture représente autour de 10% des émissions en Europe. La nouvelle stratégie de la Commission, "De la ferme à la table", vise à réduire la dépendance à l’égard des pesticides chimiques, des engrais et des antibiotiques dans l’agriculture, notamment en employant des techniques innovantes, et en appuyant l’économie circulaire et la lutte contre le gaspillage.

  • Elimination de la pollution

La Commission continuera son action de lutte contre les pollutions de l’eau, de l’air et du sol, contre les pollutions industrielles, et en faveur de l’innovation pour des solutions de substitution plus durables.

  • Aspects transversaux

En outre ce plan vert s’accompagne d’une réflexion de fond sur le changement climatique par rapport aux politiques économiques et d’aménagement du territoire. D’un côté, le projet de taxonomie (classification verte des investissements financiers) de la Commission attend encore sa validation par le Conseil, partagé entre ceux qui refusent de voir sanctionner les investissements carbone (Allemagne et Pologne) ou ceux défendant la prise en compte de l’énergie nucléaire (France).

De l’autre, la Commission adoptera en 2021 une stratégie sur l’adaptation aux effets négatifs du changement climatique. Elle annonce aussi un nouveau Pacte européen pour le climat en mars 2020, tendant vers les nouveaux objectifs climatiques précités.

Voir la page de la Commission européenne dédiée au Pacte vert pour l'Europe

Voir la feuille de route et les actions clés