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Absence d’accord à l’issue du sommet extraordinaire sur le futur budget européen

Le nouveau Président du Conseil européen, Charles Michel, a pris le relais des négociations sur le futur Cadre Financier Pluriannuel (CFP) 2021-2027 après la fin de la Présidence finlandaise. Souhaitant avancer sur le dossier, il a convoqué un sommet extraordinaire les 20-21 février et proposé une nouvelle version de la boîte de négociation.

Avec une proposition de contribution à 1,074% du revenu national brut (RNB), la version de Charles Michel présentait une très légère hausse globale (+0,7%) par rapport à la position finlandaise à 1,07%, tout en restant inférieure à celle de la Commission européenne de 2018 (1,114% du RNB), et très loin de l’avis du Parlement européen (1,3% du RNB).

Le verdict est tombé à l’issue du Conseil, c’est l’échec. Les chefs d’Etat et de gouvernement n’ont pas réussi à trouver un accord pour leur premier budget pluriannuel post-Brexit.  

Par rapport à la proposition initiale de la CE, seule la troisième rubrique concernant les ressources naturelles et l’environnement, dont la Politique agricole commune (PAC), était à un niveau légèrement supérieur. En revanche, à la fois la politique de cohésion et les rubriques liées aux nouvelles priorités (innovation, migration, sécurité, défense, politique étrangère) étaient en deçà de la proposition initiale de la CE, tout comme le Mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE) ou encore le programme Erasmus.  Par rapport à la Présidence finlandaise, Charles Michel proposait également d’augmenter le Fonds pour la défense à 7 milliards €, mais ce chiffre restait très en deçà des 13 milliards proposés par la Commission européenne, un dossier auquel la France est très attachée, comme à celui de la PAC.

Sur la cohésion, Charles Michel avançait une baisse pour les régions les plus développées au profit des régions les moins développées et en transition, et le maintien, malgré les rumeurs,  de la catégorie des régions en transition ayant un PIB par habitant compris entre 75% et 100% de la moyenne de l’UE. Cette proposition signifiait pour la France l’éligibilité à la catégorie en transition, de la quasi-totalité de la France métropolitaine à la catégorie des régions en transition, dont la Nouvelle-Aquitaine, avec un budget cohésion en baisse de 11 % environ pour la France par rapport à la période actuelle.

Le Fonds social européen était également en baisse à la fois par rapport à la position finlandaise, par rapport au budget actuel et par rapport à la proposition de la CE.

Concernant la PAC, Charles Michel proposait d’y consacrer 329,3 milliards €, soit en vertu de nos analyses 5 milliards de moins que la Présidence finlandaise (qui avait mis l’accent sur le développement rural) et 5 milliards de plus que la proposition initiale de la Commission. En revanche, le deuxième pilier actuellement pourvu de 96 milliards d’euros, raboté à 70 milliards par la CE, proposé à 80 milliards par la Finlande, rechutait à 72,5 milliards. Ce delta de 7,5 milliards correspondrait au montant affecté au Fonds de transition juste (FTJ, voir article), transféré dans cette rubrique. Enfin, une plus grande flexibilité était introduite entre les deux piliers.

Selon la France, mais également l’Espagne, l’Italie ou la Pologne, le compte n’y était toujours pas.

En revanche, les discussions sur le volet des ressources propres ont semblé progresser.

Pour convaincre les pays dits frugaux (Autriche, Pays-Bas, Suède, Danemark), Charles Michel avait également proposé la réintroduction d’un mécanisme de rabais à leur contribution au budget de l’UE, avec leur disparation progressive et non brutale. Mais cette proposition a été jugée insuffisante par ces pays qui souhaitent limiter leur contribution au budget européen à 1%.

Au final, personne ne s’est montré satisfait par le texte de Charles Michel. Pour la France, le compte n’y était pas sur la PAC et la défense notamment, pour les amis de la cohésion non plus, et pour les "frugaux", c’est toujours trop ! Charles Michel doit donc revoir sa copie pour le prochain Conseil.

En parallèle, le Président du Parlement européen, David Sassoli, dont il revient à l’institution d’approuver ou de rejeter l’accord final du Conseil, il a qualifié la proposition de Charles Michel d’inacceptable et menace les Etats membres d’un rejet de l’accord par le Parlement européen.

Un accord sera-t-il trouvé au prochain Conseil ? Le Parlement européen donnera-t-il son feu vert à un budget potentiellement en baisse par rapport à la période actuelle ?  Ces questions restent en suspens, et l’on ne peut prédire à ce stade si la future période budgétaire démarrera bien le 1er janvier 2021.